Émancipation féminine et militantisme islamique en Afrique de l’Ouest depuis 1980: quelques enseignements du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Togo et du Bénin

Workshop Femmes africaines dans une société d’hommes: espaces contraints, habilité sociale et formes d’émancipation, Université de Kabala (Mali), March 22, 2022.

Abstract

Encore aujourd’hui, nombre de féministes, d’organisations de défense des droits de l’homme et de médias occidentaux tendent à présenter les femmes musulmanes comme étant passives, opprimées et « ayant besoin d’être sauvées » (Abu-Lughod 2013). En Afrique de l’Ouest, les musulmanes sont pourtant engagées dans leurs propres luttes depuis des générations. Cette communication propose une analyse sur l’émancipation féminine et le militantisme islamique depuis les années 1980 à partir des cas du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Togo et du Bénin. Si l’engagement militant des femmes peut contribuer à la reproduction des normes sociales dominantes, l’activisme de différentes générations de musulmanes au sein d’associations islamiques de la région met toutefois à mal l’image caricaturale de la « femme musulmane » présentée comme un sujet subalterne recevant passivement des enseignements religieux patriarcaux.
Dès les années 1980 et 1990, les « pionnières » du mouvement associatif abordèrent principalement les relations de genre en termes de complémentarité des sexes. Elles s’appuyèrent sur les textes coraniques pour défendre leurs droits face aux « coutumes ancestrales » et « traditions locales » ne relevant pas de l’islam ainsi qu’à l’influence négative de la modernité occidentale. Des militantes surent aussi saisir les nouvelles opportunités offertes par la place prépondérante occupée par le genre dans la rhétorique des organisations de coopération internationale dans les années 1990 pour devenir des partenaires privilégiées des programmes de promotion féminine des bailleurs de fonds internationaux. Plus récemment, une nouvelle génération de militantes a adopté des positions plus critiques en dénonçant les interprétations patriarcales de l’islam. Bien que la plupart rejette l’étiquette de « féministes (islamiques) » en raison de la connotation occidentale et laïque de ce terme, nombre d’entre elles combinent néanmoins des cadres religieux et laïques pour aborder les questions de droits et d’émancipation des femmes.

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